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Le patriarche de la France s’en est allé

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L’ancien président de la République, Valéry Giscard d’Estaing nous a quittés le 2 décembre à l’hôpital de Tours.

Agé de 94 ans, il était hospitalisé depuis le 17 novembre dernier pour une insuffisance cardiaque. En septembre, l’hôpital Georges Pompidou l’accueillait pour une « légère infection pulmonaire ». Par ailleurs, il y avait été hospitalisé à plusieurs reprises pour raisons cardiaques dont la pose de stents.

Son parcours

Elu en 1974, il n’avait que 48 ans. Il devançait François Mitterrand de quelques points et devenait le 20ème président de la France,  premier non gaulliste de la Vème République. Ce « Président moderne » est le père de nombreuses réformes progressistes. On lui doit la majorité à 18 ans, la dépénalisation de l’avortement ou encore le regroupement familial. Le divorce par consentement mutuel ou la fin de l’ORTF font partie de ses autres réformes . Il a aussi été l’initiateur du G7, club des dirigeants des pays les plus riches. Il a scellé l’axe franco-allemand aux côtés du chancelier Helmut Schmidt.

Toutefois, certains événements noircissent son septennat comme le suicide de Robert Boulin ou les diamants offerts par Bokassa. Sa politique conservatrice, malgré son style inédit, a un effet ralentisseur sur l’économie. Suite au choc pétrolier,  sa cote de popularité est en  baisse.

En 1981, il se présente à sa succession mais est battu par François Mitterrand avec plus d’un million de voix de différence. Il redevient alors l’un des leaders de la droite en dirigeant à nouveau son parti, l’UDF.

Son parcours littéraire

A partir des années 95, il se consacre à l’écriture. Soutenu par Jean d’Ormesson, il est élu à l’Académie française le 11 décembre 2003. Il prend le fauteuil de l’ancien président sénégalais Léopold Sédar Senghor. En 2006, il rédige « Le Pouvoir et la Vie » où il se confie sur « sa frustation de l’oeuvre inachevée » après sa défaite en 81. En 2009, il publie son roman « La Princesse et le Président, »sur une pseudo-relation avec Lady Diana.

Biographie

Valéry René Marie Georges Giscard d’Estaing est né le 2 février 1926 à Coblence en Rhénanie-Palatinat (Allemagne). Il étudie à Paris au lycée Louis-le-Grand, puis intègre l’Ecole polytechnique en 1946 et l’ENA 2 ans plus tard. En 1952, Valéry Giscard d’Estaing entre à l’Inspection générale des finances. Côté vie privée, il rencontre Anne-Aymone Sauvage de Brantes qu’il épouse. Ils ont 4 enfants: Valérie-Anne, Henri, Louis et Jacinthe.

Carrière politique

Dès les années 1950,Valéry Giscard d’Estaing est inspecteur des finances puis membre du cabinet du président du Conseil Edgar Faure. En 1956, il devient député et conseiller général dans le Puy de Dôme.

 Ministre des Finances entre 1962 et 1966 sous De Gaulle. A cette époque, il crée la Fédération nationale des républicains indépendants (FNRI). Ministre de l’Economie entre 1969 et 1974 sous Pompidou, il décide de se présenter à l’élection présidentielle de 1974. Les principaux candidats sont Jacques Chaban-Delmas et François Mitterrand.

L’élection à la présidence en 1974

« J’ai dit que je voulais regarder la France au fond des yeux, mais je voudrais aussi atteindre son cœur », c’est ainsi qu’il débute sa campagne.  Plus tard, lors du débat contre François Mitterrand, il se démarque par cette phrase dont tout le monde se souvient: « Vous n’avez pas, Monsieur Mitterrand, le monopole du coeur. Vous ne l’avez pas… J’ai un cœur comme le vôtre qui bat à sa cadence et qui est le mien. Vous n’avez pas le monopole du cœur. » C’est peut-être cette proximité des Français qui l’a mené à son élection.

Le nouveau président lance un style nouveau, il n’hésite pas à s’afficher au ski ou sur un stade de football ou encore à jouer de l’accordéon. Il instaure l’habitude de dîner régulièrement chez les Français. En 1975, le premier rendez-vous a lieu chez un encadreur. Il s’y rend avec son épouse pour dîner et discuter à table comme « Monsieur Tout le Monde. »

Un nouveau départ après la défaite

A la fin de son septennat, en 1981, il décide de se présenter pour un nouveau mandat. Son principal adversaire est à nouveau François Mitterrand. Jacques Chirac, éliminé au premier tour se retourne contre lui et lui fait perdre l’élection. L’ancien président fait ses adieux aux Français à la télévision. « Je viens vous dire simplement au revoir », telle a été sa dernière phrase avant de laisser l’image d’une chaise alors qu’il quitte la pièce.

Après cette défaite, VGE refuse de siéger au Conseil constitutionnel. Il devient conseiller général à Chamalières (63) lors des cantonales de 1982, puis député aux législatives en 1984 (jusqu’en 2002). De 1986 à 2004, il préside le conseil régional d’Auvergne. Il préside simultanément le parti UDF de 1988 à 1996 , le conseil régional d’Auvergne (de 1986 à 2004) et la Convention sur l’avenir de l’Europe

Ses engagements européens

Engagé en 1957 pour l’Europe, il avait appelé à ratifier le Traité de Rome en tant que jeune député de la IVème République. Il crée le Conseil européen en décembre 1974 avec le chancelier Schmidt. C’est le lancement du système monétaire européen, précurseur de l’union monétaire et de l’euro. Sur l’initiative du président français, le G5 nait le 15 novembre 1975. Il réunit les États-Unis, le Japon, la France, l’Allemagne de l’Ouest et le Royaume-Uni au château de Rambouillet. L’Italie les rejoint et le Canada l’année suivante. En 1998, la Russie entre dans ce club fermé mais en est exclue en 2014 suite à l’annexion de la Crimée.

VGE ratifie l’élection d’un Parlement supranational européen au suffrage universel direct, donnant lieu aux premières élections européennes en 1979.

Ses convictions le mènent à prendre en 2001 la tête de la Convention européenne. Cette dernière est chargée d’élaborer pour la première fois une Constitution pour l’Europe. Sa présidence permet  à la France d’approfondir la construction européenne.

Ses dernières années

Après son échec à la mairie de Clermont, il décide à 78 ans de siéger au Conseil constitutionnel en 2004. On l’entend donner son avis sur de grands sujets nationaux et internationaux mais il préfère se consacrer à la littérature.

Après des problèmes de santé  ces dernières années, il est hospitalisé une dernière fois le 17 novembre à Tours. Malheureusement, il ne résiste pas à la pandémie et décède le 2 décembre à l’hôpital, entouré des siens.

Le Président Giscard d’Estaing désirait une cérémonie en toute intimité pour ses obsèques. Il reposera aux côtés de sa fille Jacinthe décédée en 2018, dans sa propriété au château de l’Etoile situé à Authon dans le Loir-et-Cher.

Les hommages de l’Elysée

Emmanuel Macron lors du journal de 20h du 3 novembre: « Le Président Valéry Giscard d’Estaing a quitté hier le pays qu’il a aimé et le peuple qu’il a servi. Il part en des temps tourmentés, victime à son tour de ce mal contre lequel nous luttons et qui a bouleversé le monde.  Il aura été une figure centrale de l’histoire de notre République : au tournant de ses trente ans, Ministre d’abord du général de Gaulle, puis de Georges Pompidou, il devint Président de la République à 48 ans, soutenant un projet de modernisation à un rythme sans précédent puis s’engageant pour donner à l’Europe l’idéal et la volonté qui lui ont souvent manqué ».

Les réactions  des politiques

L’annonce du décès de l’ancien président a provoqué de nombreuses réactions dans le monde politique.

  • François Bayrou:  » Valéry Giscard d’Estaing dominait par la vivacité de son intelligence et la force de ses intuitions »
  • Richard Ferrand : « C’est avec émotion que j’apprends le décès du président Valéry Giscard d’Estaing. L’idéal européen perd l’un de ses fondateurs, la France, un président qui lui a apporté modernité et audaces : majorité à 18 ans, légalisation de l’IVG. »
  • Nicolas Sarkozy : « VGE a réussi à moderniser la vie politique et  fait honneur à la France »
  • François Hollande : « Avec VGE, la France  perd un homme d’Etat qui a fait le choix de l’ouverture au monde ».
  • Roselyne Bachelot : « Il fut l’auteur de nombreuses réformes novatrices qui marquent encore aujourd’hui la société française ».
  • Jean-Pierre Raffarin :  » V. Giscard d’Estaing restera le président de la modernité et de la réforme. Il a soulevé nos espoirs, il a créé notre admiration. Les jeunes et les femmes ont trouvé avec lui une place nouvelle dans la République. La démocratie française s’est affirmée européenne… Le cœur gros ! »
  • Yannick Jadot : » Saluons pendant son septennat la dépénalisation de l’IVG, le droit de vote à 18 ans, le couple avec Helmut Schmidt au service de l’Europe ».
  • Marine Le Pen :  » Condoléances aux proches de Valéry Giscard d’Estaing. Président d’une France en crise, il fut l’artisan de nouvelles libertés publiques et un ardent soutien du progrès technologique. En 2018, il confessa que sa plus grande erreur fut d’instaurer le regroupement familial ».

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